En 2015, Mathieu Herzog créée l’orchestre chambriste Appassionato, dont l’idéal se réclame de ce que Claudio Abbado avait façonné avec l’Orchestre de Lucerne où officiaient Sabine Meyer, Natalia Gutman, le Quatuor Hagen... Une carrière qui s’ajoute plus qu’elle ne substitue à celle d’altiste au sein du Quatuor Ébène : l’archet ne le quitte jamais, que ce soit en tant que musicien (les opus 130, 131, 132 de Beethoven restent pour lui une source intarissable) ou en tant que professeur fort de quinze années d’expérience en quatuor (classes de maître ou cours particuliers donnés à son domicile suisse à des élèves venus du monde entier).
Fils du directeur du conservatoire de Boulogne Alfred Herzog, Mathieu a très tôt baigné dans la musique « classique » de manière immersive. A telle enseigne qu’il lui a fallu attendre la fin de l’adolescence pour s’ouvrir à d’autres styles de musique, au service desquels il entame une activité parallèle d’arrangeur. Aujourd’hui, il met son talent d’arrangeur au service de Debussy (orchestration de La Cathédrale engloutie) et d’autres compositeurs (réduction pour l’effectif d’Appassionato de l’ouverture du Vaisseau fantôme, de L’Apprenti Sorcier…). À ces deux occupations il convient d’en adjoindre une autre : rédacteur d’un livret d’opéra sur les derniers jours de la vie de Bizet, anéanti par l’échec de Carmen. Ce livret attend toujours son compositeur…
De retour de Londres où il s’est produit avec son ensemble au Wigmore Hall, Hervé Niquet évoque tout naturellement la vie d’itinérance des artistes, contraints à passer un temps considérable dans les transports… surtout quand un évènement comme celui de la mort de la reine d’Angleterre vient s’ajouter aux délais d’attente déjà importants à la frontière franco-britannique. 2022 a été une année extrêmement lourde en raison de l’anniversaire de Molière et du report de concerts annulés pour cause de Covid.
Comme le souligne Jany Campello, Florentine Mulsant « a toujours quelque chose en cours pour le piano ». Le double CD paru chez Ar Re-Se en témoigne, avec des pièces qui s'échelonennt de l'opus 4 (Amers, 1984) jusqu'aux onze Préludes op. 78, composés en mars 2018, qui viennent clore un ensemble de vingt-quatre pièces initié avec les sept Préludes op. 70 un an auparavant. Pour la compositrice, le piano sert de « laboratoire », de « journal » où se reflètent des impressions puisées à toutes les sources : lectures, œuvres d'art, voyages. Pour autant, Florentine Mulsant évoque aussi son affinité particulière avec les cordes ; « j'aurais rêvé apprendre à jouer du violon, le grain du son est magnifique » confie-t-elle. Elle a composé cinq quatuors à ce jour, mais aussi pour des effectifs plus inhabituels (Sonate pour contrebasse et piano, Quatuor de violoncelles…) et travaille actuellement à un Quintette avec piano, réunissant ainsi son instrument avec les cordes qui sont pour elle « un chemin vers la voix ».
Au cours de ce déjeuner, Florentine aura partagé son unvivers musical, comme elle le fait avec ses interprètes, souvent fidèle. Elle nous aura laissé imaginer son atelier où elle élabore une œuvre qui, comme le dit très justement Jany Campello, laisse « saisir la musique, loin de l'hypertechnicité ».