« Rumeurs », c'est l'intitulé que l'Opéra-Comique réserve à l'animation qu'il met en place pour faire cortège à chacune de ses grandes productions.
Récemment, Pierrot Cadmus a ainsi fait pendant parodique à son modèle, la première tragédie signée de Lully et Quinault offerte au même moment avec pompe dans la grande salle, renouant par là le fil traditionnel du pastiche qui accompagnait tout grand succès théâtral sous l'Ancien Régime. Ce divertissement drôle et enlevé, conçu en son temps par Carolet, jouissait d'une partie de l'équipe de Cadmus et Hermione, avec même la participation (exceptionnelle ?) de Benjamin Lazar comme acteur. Quelques chants, de rares instruments, un tréteau et deux ou trois objets ont suffi, et l'heure passa vite. Dans la salle Bizet, au rez-de-chaussée, Arnaud Marzorati présentait pour sa part des chansons de Béranger, « le chantre de la Révolution ». Plus d'un siècle a donc passé, mais le dépaysement a été pareillement du voyage pour ce cabaret d'époque que le baryton servait à plaisir.
C'est ainsi que sont succédé le cycle de récitals « les Levers du Roy », concoctés par Vincent Dumestre et les membres isolés de son Poème Harmonique, ou à la charge de l'Ensemble Ausonia de Mira Glodeanu ; ou bien les « Confidences », susurrées par l'exposition « Scènes de ballets de cour », ou le colloque international « l'Invention de l'opéra français » ; comme les " miroirs ", tel le Carnaval et la Folie, comédie-ballet de Destouche présentée par l'Académie d'Ambronay sous la battue d'Hervé Niquet. Le vocabulaire imagé ne manque pas pour désigner ces initiatives qui se veulent le reflet du dynamisme de la maison : " aller à la rencontre du public, multiplier les accès et chemins de traverse en éclairant chaque production phare par une multiplicité de manifestations annexes ", selon les vœux de son directeur. Car cette politique entend aussi favoriser l'accès d'un répertoire méconnu au plus large public. Jérôme Deschamps ne manque pas d'idées comme quand il institue, par exemple, un " mécénat de regard ", formule qui permet à une personne un peu plus fortunée d'acheter une seconde place qui profitera à un invité inconnu d'elle.
Pour les retrouvailles avec Zampa, en mars, la rumeur enflera, comme il est de règle. Et d'autres surprises émailleront différents lieux du théâtre en écho au grand spectacle du mois. En l'espèce, l'Opéra-Comique pousse encore davantage une politique d'ouverture que pratiquent d'autres institutions lyriques, le Châtelet, le Théâtre des Champs-Élysées et bien entendu d'Opéra de Paris, pour n'en rester qu'au cas parisien. Chacun tente d'apporter sa réponse à l'incertitude de l'opéra, genre encore taxé d'historiquement daté et socialement marqué, face à son avenir, à ses scléroses. La survie est à ce prix. Mais ici s'ajoutent le désir et l'enthousiasme qui relèvent les plus téméraires défis : en l'occurrence, celui de renouer avec un répertoire oublié et d'œuvrer à sa réhabilitation. L'Opéra-Comique retrouve son identité : nos souhaits de réussite l'accompagnent.