Chostakovitch (1906-1975) est célébré comme le Beethoven du XXe siècle.
Le centenaire du compositeur russe ressemble a un vrai marathon tant ses oeuvres (les quinze symphonies, les quatre opéras, les trois ballets, une opérette, les six concertos, les quinze quatuors à cordes, sans compter les pièces de musique de chambre) sont jouées dans le monde entier.
Cette saison, treize villes programment les opéras du compositeur pour quelques cinquante représentations. A Paris où Irina, la veuve du compositeur, vit une partie de l'année, a été créée l'Association Internationale avec le Centre de Documentation de Musique Contemporaine « Dimitri Chostakovitch » dont l'objet est notamment de valoriser et de perpétuer son œuvre. Les manifestations parisiennes pour l'anniversaire du musicien culmineront avec les quatre concerts de l'Orchestre de Paris– les 15,16, 22 et 23 novembre – sous la direction de l'élève et de l'ami du maître russe, Mstislav Rostropovitch.
Notre confrère Victor Ignatov, journaliste à la Pensée russe et également correspondant à Paris pour la musique et la danse de chaînes de télévision et de radio russes, rentre de Russie où il a assisté à de nombreuses célébrations. Victor Ignatov a vu également une rareté, le ballet L'Âge d'Or.
Créé en 1924 au théâtre Kirov de Saint-Pétersbourg, ce ballet fortement critiqué par les autorités n'eut aucun succès. C'est seulement en 1982 que Youri Grigorovitch, directeur du BolchoÏ, le fit renaître avec difficulté. « Nous étions les premiers à oser monter un ballet de Chostakovitch car c'était interdit par le parti communiste, explique Grigorovitch. Après j'aurai bien aimé chorégraphier les trois ballets de Chostakovitch que j'avais connu et que j'admirais, mais j'ai du quitter le Bolchoï après trente ans car je n'étais pas d'accord avec la politique artistique de la nouvelle direction. Aujourd'hui, ce ballet retrouve une dynamique nouvelle à la fois grâce aux danseurs mais aussi à une chorégraphie qui épouse parfaitement la musique ».
Comment est considéré Chostakovitch en Russie aujourd'hui?
« Un génie. Ce qu'on préfère dans son oeuvre en Russie, ce sont les symphonies. Les plus populaires sont la Septième, dite Leningrad parce qu'achevée en 1941. Elle symbolise la résistance à l'envahisseur. On aime aussi la Treizième « Babi Yar », créée en 1962 à partir du poème d'Evtouchenko. Parmi les opéras les plus joués sont Lady Macbeth et Le Nez et ce que l'on aime encore, c'est l'opérette Moscou, quartier Tcheriomouchki que l'Opéra de Lyon a donnée voilà plusieurs saisons. Elle est considérée comme passionnante parce que c'est la politique et le pathétique russes à travers la musique. Chostakovitch est le miroir en musique de l'époque stalinienne en Union Soviétique dans toutes ses ambivalences. Il a raconté la vie quotidienne des russes à tous les genres de la symphonie à l'opérette, du jazz, à la musique de films ».
Ce 18 octobre, Irina Chostakovitch recevra les insignes d'Officier dans l'ordre des Arts et des Lettres dans les salons du Ministère de la Culture.