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Catherine Kollen
Catherine Kollen - photo DR

 

Fidèle à sa vocation et à son attention à l’égard des jeunes talents et de ceux qui les soutiennent, la PMI reçoit en ce mois de mars Catherine Kollen, directrice de l’Arcal depuis 2009 et dont Pedro-Octavio Diaz résume le parcours : formée en musicologie autant qu’en gestion des affaires culturelles, elle passe au Gewandhaus de Leipzig, avant derejoindre le centre de musique vocale de Royaumont qu’elle a contribué à développer dans sa forme actuelle.

L’Arcal se définit comme une compagnie lyrique, imaginée il y a trente ans, destinée à faire se rencontrer des artistes à la croisée du théâtre et de la musique. Notre invitée souligne l’importance de la transversalité entre les arts, entre le spectacle et les sens, sinon le monde, colonne vertébrale du programme de la structure, dont la portée ne manque pas d’être également politique.

À titre d’exemple de ce travail de décloisonnement est cité un atelier entre compositeur, musiciens et metteur en scène destiné à faciliter le passage de la conception à la réalité du spectacle, dont l’écart n’est pas toujours mesuré par les novices dans l’écriture d’un opéra. La commande de l’Arcal créée en 2010, My way to hell de Matteo Franceschini, réglée par Volodia Serre, en offre un pertinent avatar, rapprochant le madrigal montéverdien et le hard rock d’AC/DC, mélange qui a finalement abouti à un véritable travail d’adaptation.

Chaque projet est ainsi le fruit d’une synthèse, voire d’une symbiose, entre les différents acteurs, en particulier le chef d’orchestre et le metteur en scène, et un lieu. Parti d’une réflexion sur la déclamation chantée, Le Retour d’Ulysse dans sa patrie avec Jérôme Correas à la tête des Paladins et Christophe Rauck s’affirme à cette aune comme l’une des plus grandes réussites artistiques de la compagnie, mais également du point de vue public : les dix représentations au Théâtre Gérard Philipe de Saint-Denis ont affiché complet, signe que la production a suscité une audience dans un territoire habituellement négligé par la cartographie musicale. De fait, le recrutement va de pair avec les projets. Catherine Kollen a auditionné plus de 8000 voix depuis Royaumont, et possède naturellement aussi des indicateurs sur les solistes qui pourraient l’intéresser.

On se dirige ensuite vers un rapide panorama du théâtre musical dont les assises se sont tenues récemment aux Bouffes du Nord, où notre interlocutrice s’est trouvée assez isolée face à des directeurs et des metteurs en scène aux prises avec leurs problématiques limitées à la dimension théâtrale, négligeant ce point d’articulation avec la musique que défend l’Arcal. On évoque d’autres structures concentrées sur l’émergence de jeunes chanteurs, à l’image d’Opera Fuoco, dirigé par David Stern, chef doué d’un remarquable sens pédagogique, qui privilégie le potentiel et la constitution de répertoire dans le recrutement.

La discussion ne peut bien entendu pas oublier la dimension budgétaire, d’une acuité accrue en ces temps de crise, et notre convive déplore que la région Champagne-Ardennes abandonne la structure alors qu’elle était parvenue à une consolidation et une viabilité financière. La tutelle a argué du fait que l’Arcal n’était pas en résidence dans son territoire, mais en Ile-de-France. Les pistes pour combler ces 90 000 euros qui font défaut – soit la moitié du budget consacré à la production artistique au sein d’une structure comptant six permanents – s’orientent vers les départements, en particulier les trois avec lesquels la compagnie travaille de la manière la plus resserrée (l’Essonne, les Yvelines et les Hauts-de-Seine), en approfondissant l’ancrage en zone rurale, délaissée par les grandes institutions parisiennes, pour lesquelles on se gardera de toute comparaison à l’aune des économies d’échelle, irréductible dada des pouvoirs publics.

À l’appui de quelques résumés et feuillets de présentation, nous enrichissons notre panorama du travail d’Arcal, trouvant une occasion de prendre note de quelques dates dans nos agendas, tout en remerciant Catherine Kollen d’avoir accepté l’invitation de notre PMI.

Gilles Charlassier